vendredi 20 décembre 2013

Episode 46 : Noël Tamère

Chers tous,


Même Disney le confirme avec sa dernière production, cette année, le froid et la glace sont à la mode.

Ainsi, comme pour satisfaire les fantasmes des bobos parisiens et leur rêves de voyages au pays du Père Noël, Madame Norvège , plus mystérieuse et majestueuse que jamais, ne montre d’elle que des images à caler entre les pages déco et les pages « témoignages de vraies vies » d’un magazine féminin pour CSP+.

Nous voici entrés en décembre, dans une vie de neige, de nuit, et de lumières de Noël.


Et si les pays du Nord et leurs manteaux blancs font rêver les grands et les petits, les scandinaves, égaux à eux-mêmes, répètent les mêmes rituels que toutes les années précédentes.

Alors comme c’est bientôt les vacances, et que franchement y commence à en avoir foutument marre de s’emmerder à bosser, voici un petit carnet de « fun facts » sur les traditions de Noël norvégiennes.


Avant Noël


1) Le 13 décembre, jour de la Sainte Lucie, les enfants norvégiens mettent des bougies sur leur tête, mangent des brioches sèches et sans goût (« Lussekater ») et chantent des chansons mièvres qui vous restent en boucle dans la tête.

Ah si si. Paie ta version ange blond de l'exorciste. Et même que c'est über mauvais esprit de pas trouver ca mimi. 

2) Les Scandinaves sont des maniaques des calendriers de l’avent…


Pas de bras pas de chocolat

3) Il est de bon aloi de fabriquer des maisons en biscuits à la cannelle,


mais toutes les familles n’ont pas le sens de la mesure…


Reconstitution de Trondheim en biscuits et crème, SOS dégueu. Tout cela sera finalement mangé à Pacques quand 3 mois de poussières se seront accumulés sur les miasmes que tante Ingunn avait déjà laissés au réveillon


Le Père Noël est une ordure

1) Les trolls ne travaillent plus dans l’atelier du Père Noël depuis que l’un d’eux a eu un grave accident du travail en cherchant à atteler un élan au traineau. Ledit animal lui aurait rué à la gueule en lui disant « Mais tu m’as pris pour un renne ou quoi, connard ? »

ndlr. j'ai pas de photo mais si quelqu'un en a je veux bien

2) La maison du Père Noël se trouve en réalité à Drøbak (au sud d’Oslo ) et a été bien contente d’embaucher tous les trolls puisqu’ il n y a ni renne ni élan, il s’agit d’un attrape touristes. Sans déconner, cet endroit recoit les dizaines de milliers de lettres adressées par la poste au Père Noël.
http://www.julehus.no/kat/000011.asp


Le dîner de Noël…

1) 50% des Norvégiens boivent leur propre bière de Noël brassées home made

Les grands parents de Bjørn Håkon sont des fin connaisseurs. Mamie brasse et papi rote.

2) 80% des Norvégiens chantent des chants et font la ronde en famille le soir de Noël autour du sapin avant de passer à table

Le problème de la notion de famille dans les villages de consanguins

3) les plats traditionnels norvégiens du dîner de Noël sont


Par ordre d’apparition, les nominés ribbe, pinnekjøtt et lutefisk. Avec tout ça, on boit de l’aquavit, « infâme alcool de pomme de terre» en français dans le texte

Tout est question de timing :

1) Pour la soirée de Noël de l’entreprise le 15 novembre, les norvégiens se mettent sur leur 31, passent à table à 18h et oublient à 22h comment ils ont réussi à rentrer chez eux.

Avant / Après, vous voyez l'idée... et après on s'étonne que toutes les meufs de mon étage soient enceintes en même temps...

2) En Norvège, la messe de minuit est à 14 heures


Soleil au Zénith à Sandefjord

3) Il existe une infinité de mots commençant par « jul », ie Noel.
Julestjerne = étoile de Noël
Julekaker= gâteaux de Noël
Julebrus= soda de Noël
Julekaffee = café de Noël
Julete=  thé de Noël
et attention c’est là que ça se barre en vrille :
Juleklem = accolade de Noël (wzf??)
Julekos = plaisir de Noël ??
et les classiques petite veille de Noël (23 décembre), veille de Noël (24 décembre), 1er jour de Noël (25 décembre), 2ème jour de Noël (26 décembre), etc, etc parce qu'il faut le finir le jerrican de bière maison de Mamie!



Joyeux Noël à tous,

Martine







mercredi 27 novembre 2013

Episode 45 : Grutt, la meilleur boutade norvégienne

Chers tous,

Une fois n’est pas coutume, je commence ce nouvel épisode par un coming out tout à fait personnel. En Norvège, je suis une comique. Oui, je fais du stand up, de l’humour, de la plaisanterie. Quelques soirs par mois, je raconte des conneries dans un micro, en somme.

Cette double vie n’étant qu’un secret de polichinelle pour la plupart de mes amis français, vous trouverez ci-dessous une série de FAQ (Frequently asked questions, quoi !) auxquelles je suis parfois amenée à répondre.

De quoi rient les blonds ?

Et bien les blonds ne sont pas politiquement corrects du tout, figurez-vous. Ils ont pas froid au plat et adorent mettre les pieds dans les yeux. Et vas-y que je trash sur tous les sujets qui fâchent, même si certaines boutades peuvent laisser de glace. C’est pas la glace qui leur fait peur de toute façon.

Après tant d’épisodes de Martine, j’imagine en outre que vous serez moyennement surpris d’entendre qu’en Norvège, on aime surtout bien se moquer des Suédois.
Fusent donc régulièrement des blagues gratos mais bien méritées pour cet horrible pays d’armoires en kit, de métrosexuels, et de juments qui font trop d’UV. Mais pas du tout que les Norvégiens ont fini par m’influencer avec le temps putain pour les pauvres suédois dans le public. Les Suédois étant considérés comme le « cheap labour » de la Norvège, et ayant, entre autres, noyauté le milieu de la restauration, une classique est la suivante « Vous êtes tous suédois au premier rang ? OK donc le resto d’en face est fermé ». Les norvégiens jubilent. Il en faut peu pour être heureux.



Et toi, tu racontes quoi ?

Ça n’a pas été très facile d’écrire des textes qui fassent marrer les blonds. Par exemple, cette blague «Crache pas par terre, avec le froid qu’il fait, ça va rester sur le trottoir jusqu’à Pâques» ne les fait pas marrer, c’est du bon sens.

En revanche, «En France, on ne trouve pas normal que le métro soit bloqué à causé d’un élan sur les voies» (ndlr. ça arrive vraiment), ça les faisait bidonner, ou encore la classique «Je suis contente qu’il ne neige pas encore» les amuse tellement que souvent ils applaudissent. Ils sont mythiques ces immigrés quand même, qu’ils se disent.

Du stand up ? Et tu fais ça dans quelle langue ?

Et bien en norvégien. Mais j’ai souvent une phrase ou deux en suédois, car, après tout, moi aussi je trouve ça mérité mérité mérité marrant de me moquer des Suédois.

Allez, en voilà une bonne car je sais que vous aussi, vous aimez bien rigoler.
https://www.youtube.com/watch?v=0ILG1O7g8Do


Le truc injuste, c’est les anglo-saxons qui débarquent sur les scènes de stand up à Oslo et font des trucs super en anglais, ce qui ne pose aucun problème car mes copains les blonds parlent fluently you know. Et vas-y que je te cale des Oh My God et des well,you know what I mean avec un clin d’œil qui cartonnent.

Alors que ces abrutis de Norvégiens ne comprennent même pas «Il est mignon Monsieur Pignon» en français dans le texte. Monde de merde, comme dirait Abitbol, ils savent pas à côté de quoi ils passent.

Tu fais ça avec qui ?

La Norvège étant un petit monde, je me suis plusieurs fois retrouvée programmée dans la première partie des personnes qui font de la télé. Les moments de solitude, c’est quand en back stage (et ça, c’est du vécu) je retourne la question « Tu as déjà fait beaucoup de stand up ? je t’ai jamais vue ?» à un type qui a fait 15 ans de télé et qui est méga connu et que j’en avais aucune idée.

Quel genre de public as-tu ?

En quelques années, j’ai coché pas mal de cases.

Il y a eu mes potes bien sûr, mais aussi leurs potes, mes collègues, mon patron, les parents, la sœur et les cousines de Bjørn-Håkon, mon dentiste (qui est aussi mon patron, c'est un petit pays je vous dis).
Il y a eu aussi

• le public des scènes de stand up du quartier est d’Oslo à qui l’on a droit de tout raconter, depuis des considérations existentielles jusqu’à Fort Boyard, largement connu en Norvège aussi…

• les étudiants bourrés à 18 heures, qui rient à des blagues plus cheap tu meurs. Je disais bip bip ils kiffaient. Un de mes meilleurs moments à la et quand il pète il troue son slip.

• Le groupe d’intellos qui rient en octave piano piano à mes blagues sur les différences sociétales France / Norvège et leurs retombées économiques dans la seconde moitié du XX ème siècle (en alexandrins), mais à qui Fort Boyard échappe complètement

• Le mec du public qui veut absolument parler français dans le micro et monte sur scène pour s’imposer (oui il était dans le groupe des étudiants bourrés)

• mon pote français de passage à Oslo qui filme et rigole à contre temps. Il comprend rien, mais une des meufs au premier rang a un sacré rire de gourdasse

• la palme de la palme : la fête des 60 ans d’une association de chasse et pêche au milieu de nulle part, avec que des vieux croutons a moustaches que j’ai fait rire jusqu’à se filer des torgnoles sur les cuisseaux en racontant que je savais pas la différence entre un renne et un élan quand j’ai emménagé en Norvège

Les gens te reconnaissent-ils dans la rue ?

I wish ! Face it, personne ne m’a jamais posé cette question en fait. En revanche, et c’est véridique, à mon dernier show , une fille du public m’a dit après le spectacle : « Pendant tout ton speach, je me suis demandée ou je t’avais déjà vue. Mais je me souviens maintenant, c’était en boite, tu t’étais étalée la gueule dans les escaliers devant tout le monde.» Par-fait.

Le bécot,


Martine





lundi 21 octobre 2013

Episode 44: Le foot m'a tuer

Chers tous,


Qui l’eut cru ? Côté sports, ce n’est peut-être ni le ski ni le curling qui rassemblent le plus de Norvégiens. Non. C’est sûrement le foot.

En effet, si l’on considère le fait que la Norvège compte cinq ligues, on en vient facilement à la conclusion mathématique que, entre première ligue (incluant d’ailleurs elle-même des noms colorés en å et ø foutument inconnus au bataillon) et cinquième, rassemblant des clubs d’entreprises ou de l’amitié des anciens du lycée professionnel d’Hønnefoss, 86% des hommes en âge de pratiquer le football jouent dans une ligue en Norvège. [1]
Toutefois, bien que très largement pratiqué, le football est, dans ce grand pays tout vide, assez familial. Brisons un premier tabou : aucune des villes norvégiennes n’est une mégalopole anonyme. Alors quand on vient au patelin de vingt à trente mille habitants, on croise toujours une tête connue au stade.
(Et alors en ligue 2, je vous raconte pas, on est trente au mieux si les matchs ne sont pas à domicile, et là, c’est carrément la smala. Et vas-y que je te claque la bise dans les gradins des supporters et comment va ton petiot qui a la grippe qu’il était pas au judo mardi soir m’a dit mon fils.)

A la mi-temps, les « surveillants » qui sont aussi l’oncle et le cousin du frère du président du club des supporters vendent des gaufres et du café. Assez loin de l’ambiance oreillettes et hooligans, donc.
Les stades sont à moitié vides mais on annonce triomphalement le nombre de personnes dans les gradins (enfin parfois il n’y pas de gradins du tout, on peut toucher les joueurs quand il y a corner, grrr par ici le petit blond) « quaaaaaaaatre cent vingt-trois personnes !!!!!!!!!!!!!!!! »

Le plus rigolo, c’est quand les joueurs de l’équipe croisés par hasard dans la rue ont ce genre de réplique fascinante pour les supporters (véridique) « ah je t’ai pas vu au dernier match »

Enfin, cela va sans dire, on passe aussi fastoche à la télé.


Exemple de foule en délire soutenant SF (=Sandefjord Fotbal, what else?)


Alors c’est vrai, c’est familial et les gaufres c’est sympa, mais on n’assiste pas toujours à du grand jeu non plus. Brisons ici un second tabou, le niveau de la Norvège en foot n’est pas équivalent à celui qu’elle a en ski de fond. Les quelques coups d’éclat restent dans les annales, comme la victoire contre le Brésil dans les matchs de poule en 1998 à Marseille, que les blonds déforment d’ailleurs avec culot en « On a gagné contre le Brésil à la coupe du monde 1998 ». Les rares joueurs norvégiens connus à l’étranger font la fierté de leur pays, mais à l’heure actuelle, personne ne saurait en citer aucun. (Même Zlatan est suédois, vdm).

Ainsi, tous les Norvégiens soutiennent une équipe de ces PD d’Anglais, dont la ligue est ici chérie et suivie avec le plus grand intérêt. Curieusement, Liverpool et son « You’ll never walk alone » vendrait plus de rêve que « Heia Heia Ålesund ». Plus étrange encore, tous soutiennent avec ferveur la Suède dans les compétitions internationales où la Norvège ne joue jamais pas. (ndlr. et là je reconnais ne toujours pas avoir élucidé ce bug).

Pourtant, les joueurs de foot norvégiens sont des héros. Ces mecs-là savent jouer au foot en se battant contre les éléments,


S’adaptant coute que coute à leur milieu




Ils jouent dans des conditions extrêmes




En somme, les norvégiens ont inventé un nouveau sport :




Y a plus qu’à faire passer le foot sur neige comme une discipline à part entière, et la Norvège est championne du monde aux prochains JO d’hiver :-)




Le bécot,

Martine


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[1] Moi, on m’a même appelé une fois pour me demander d’arbitrer tellement ils sont à la dèche de gens. Mais comme Bjørn-Håkon remplaçait déjà le gardien d’une équipe et que sa mère remplaçait le gardien de l’autre, j’ai préféré pas m’emmêler.




lundi 16 septembre 2013

Episode 43: Norvisage : la démocratie au goût saumon

Norvisage

En ces dimanche 8 et lundi 9 septembre 2013, les Norvégiens ont élu leur nouveau parlement, qui va désigner lui-même un nouveau gouvernement

Introduction à la démocratie norvégienne, entre transparence des partis, mesure des campagnes, pudeur des électeurs et participation maximale.

Quels débats ? Quelles questions ?

Au risque de décevoir les clichés, les débats politiques en Norvège ne tournent pas autour de « Comment promouvoir le steak d’élan dans les cantines scolaires ? » ni « Plus de jour au-delà du cercle polaire en hiver ! ».
Malgré ses aspects parfaitement singuliers de cohabitation entre traditions ancestrales et modernité 3.0, combinés à la manne pétrolière dont les compteurs tournent toujours à vitesse éclair, la société norvégienne s’inquiète, comme ses voisins européens, de santé, de marché du travail, d’éducation et de logement.

(ndlr. Bon, je reconnais, il y a aussi eu en parallèle les vives discussions sur la candidature d’Oslo aux JO d’hiver de 2022, qui sont empruntes de thèmes chers à mes copains les blonds, et parfaitement détachées de toute considération normale. Si on a les jeux, où seront les épreuves de saut à ski ? Et le slalom géant ? C’est dégueulasse, c’est encore Lillehammer qui aura le bobsleigh !)

Des vrais faux problèmes ?

Regarder les débats politiques norvégiens avec des lunettes de français est toutefois tout aussi passionnant qu’interloquant. Chère Norvège, as-tu vraiment des problèmes ?

Que fera-t-on dans 50 ans quand les ressources du pétrole commenceront à diminuer ? Et comment payer les retraites dans 150 ans ? (Ah ! Flash info : on vient de trouver un nouveau gisement de pétrole en mer de Norvège ! Je corrige ma question, comment fera-t-on dans 200 ans avec les retraites ?). Pour information, l’âge légal de départ à la retraite en Norvège est 67 ans…

Dans une ambiance de crise en Europe, c’est un peu comme si Scarlett Johansson venait vous dire qu’elle se trouve grosse et moche alors que vous venez de finir le paquet de Pépitos en pyjama devant la télé.

Comment intégrer une immigration croissante dans un pays sans criminalité ou presque, sans chômage, sans passé compliqué avec les pays d’origine des migrants, avec une école qui intègre tout le monde, et un état qui soutient financièrement 100% des étudiants à taux zéro ?

La démocratie c’est TOUT remettre en question

Pourtant, les politiciens norvégiens ont cela d’admirable qu’aucun n’hésite à tout remettre en question.

Jens Stoltenberg lui-même, premier ministre norvégien du parti travailliste au pouvoir depuis huit ans est venu dans les usines Carlsberg dans le cadre de sa campagne électorale. Bien qu’il soit un chouchou de l’électorat, il a attaqué son discours en demandant ce qu’on peut faire de plus, de mieux, de différemment.

(Mais je sais ce que tu peux changer Jens, bordel ! Comment c’est possible que les fenêtres qui ferment mal soient légales en hiver dans ce pays ? Et promets-nous d’importer de la bouffe mangeable bon sang !)

Certains ont même osé: si nous sommes au gouvernement, nous arrêtons l’exploitation du pétrole demain et passons à une énergie verte - et il n y a pas que les écolos qui ont mis l’avenir de la planète en tête de leur programme. Cette idée n’est toutefois pas très populaire, quand elle est (facilement) contrée par tous ceux qui affirment que le trésor pétrolier sert à construire des hôpitaux, des écoles, financer des congés parentaux interminables, investir dans la recherche et le développement de nouvelles industries pour l’avenir du pays…

Prix Nobel de la Paix ? Transparence et retenue

La transparence et la mesure semblaient par ailleurs être d’aloi dans la campagne norvégienne.

La campagne électorale a une date de lancement officielle que tout le monde respecte, et se déroule dans le calme - pas de braillement dans les rues, pas de tracts par terre, de la tenue enfin, presque même de la discrétion.

Le parti travailliste fait campagne avec un syndicat ? Et bien ce n’est pas un secret de polichinelle, bien au contraire, on s’en sert comme argument pour convaincre. Rien n’est caché donc, jusqu’aux factures de portable des politiciens. Le ministre de l’économie s’est lâché sur facebook lors d’un voyage en Inde il y a 6 mois, et a fait exploser sa facture de téléphone. C’est ça qui a fait scandale cette semaine-là… (Autant vous dire que quand les français racontent à Bjørn Håkon DSK, les 3 femmes de Sarko, la fille cachée de Mitterrand et on en passe, il les regarde avec des yeux ronds comme des billes.)

Même dans les programmes des partis d’extrêmes, une relative mesure semble de mise, ce qui donne l’impression avec des yeux de français d’une foutue accumulation de partis de centristes.
Mieux, on lève la main pendant le débat.





Ca manquerait presque d’un peu de fight, mais le poids de la colombe de la paix pèse sur le petit pays du plus noble des prix Nobel.

Une blonde ou une blonde, en tous cas une femme !

Autre point important de la campagne : parmi les 9 plus gros partis norvégiens, 5 ont une femme à leur tête. On reconnait bien là la vision de la société à la sauce scandinave. Formidable, je dis.

Ce qui est amusant, c’est qu’elles sont toutes blondes avec les cheveux courts, et qu’en voyant cette galerie de portraits, on se rend compte qu’Eva Joly est bien une femme politique norvégienne !



Ah oui, et si vous ne vous y retrouvez pas très bien, j’ai oublié de vous préciser que parmi ces femmes il y a deux candidates de droite et deux de gauche mais qu’en Norvège une partie de la gauche est à droite. Fastoche…


Tu votes, un point c’est tout

Il est possible en Norvège de voter à l’avance, dans des bureaux des votes ouverts tous les jours des semaines avant l’élection, on peut aussi voter sur internet, et les élections ont lieu à la fois le dimanche et le lundi. Pas de bonne excuse à l’abstention, donc.

« Certaines communes de Norvège ont tellement peu d’habitants que si tout le monde ne vote pas il y a plus de candidats que d’électeurs et on sait encore plus facilement qui a voté quoi. » me disait amusé, un collègue. « Allez Mamie, connecte toi sur internet et vote, histoire de brouiller les pistes dans la charmante bourgade de Mo i Rana. »

Oui, car en Norvège, on ne dit surtout pas pour qui on vote. Rien à la cantine au boulot, rien sur facebook, rien dans les déjeuners familiaux, Chut !

Quelle gagnante finalement ?

Erna Solberg semble être la femme de droite qui va reprendre la main sur le gouvernement norvégien. La coalition de droite est en formation, et malgré mon amour à peine dissimulé pour Jens Stoltenberg, Erna semble avoir une tête bien faite et mon cœur de féministe est aussi bien content qu’on fasse de la place aux bonnes femmes.

La définition du conservatisme norvégien est par ailleurs à prendre avec nuance : coalition de droite conservatrice ou pas, je peux vous assurer que vous avez plus de chances de vous faire dégager de ce pays si vous affichez une préférence pour la Suède ou pire que vous refusez d’exploser de joie quand on dit ski de fond que si vous êtes immigré.

Le bécot à tous

Martine

lundi 19 août 2013

Episode 42 : Avec Bjørn-Håkon chez Björk

Chers tous,

L’Islande est un pays sublime. Une semaine dans des paysages comme








Avec de la flotte sous toutes ses formes comme 






Et beaucoup, beaucoup, de chevaux comme



L’Islande est si magnifique qu'elle déchaine les passions. C’est comme si tous les visiteurs en revenaient conquis, comme s’ils se sentaient pousser des ailes de poètes au moment de raconter leur voyage, depuis « chatoyant, mystérieux, sauvage et imprenable » à « ouf, canon, juste awesome ». Même le Loney Planet a des envolées lyriques ampoulées « The past meets the present in a fusion of fire and ice et blabla ».
Bref, l’Islande c’est beau la vie, pour les grands et les petits. Et il faut bien reconnaitre que c’est ouf, canon, juste awesone.
Certains disent même que l’Islande ne ressemble à rien au monde, qu’on s’y croirait sur une autre planète. Une Islandaise nous rappelait toutefois, avec une touche de sagesse : « Des touristes nous disent : votre pays est somptueux, il ressemble à Mars ou la Lune. Enfin moi je dis ils en savent rien, ils y sont jamais allés»

Lorsqu’on vit en Norvège, l’Islande a toutefois des côtés étrangement familiers. Rien de très surprenant ici, puisque le pays a été peuplé il y a 1 200 ans par des vikings hors-la-loi ou en fuite.
Le drapeau d’abord, qu’on a l’impression d’avoir déjà vu quelque part…



 Norvège... 

versus Islande, extrait du grand traité du daltonisme nordique 

Le nom des villes ensuite, qui terminent en « -vik », la blancheur de la peau des mecs là-bas (« Si je peux me permettre monsieur, vous avez l’air de manquer un peu de soleil, je me trompe ? »), les légendes aux elfes, trolls et autres créatures malveillantes à cheveux longs, qui n’en ratent pas une pour vous mettre des bâtons dans les roues enfin, un peu comme l'était ma prof de maths de 5ème.

Culturellement, les islandais (tout du moins avec des yeux de française) paraissent proches également des Norvégiens. Dans la retenue, et leur flegme se combine avec le même humour décapant que celui de mes copains les normands. On peut acheter des T-shirts en Islande montrant un volcan en fusion avec le slogan « We have no cash but we have ash », faisant écho aux T-shirts en Norvège avec un dessin de chasse à la baleine indiquant «If we had dolphins, we’d kill them too ». Enfin, ils ont ce même amusement non dissimulé à dire du mal des Danois, puisqu’ils sont, eux aussi, passés par un paquet de siècles de domination des « petits gros de la Scandinavie ».

Alors, quelle vérité sur cette île incroyable finalement ? Si les ancêtres de Bjørn Håkon avaient été des fugitifs au 10ème siècle, voilà ce à quoi aurait, peut-être, ressemblé Martine chez les blonds.

Mártine chez les blónðs éþisode 1

Chers tous,

Voilà déjà une semaine que je suis installée à Reykjavik. Bjørn-Håjon Jóhanesson m’a bien accueillie chez lui à Bústaðavegur.

Mon quotidien est bien rempli ! Chaque jour, je vais voir une cascade (Gullfoss, Aldeyjarfoss, Grattemoilesfoss) puis le geyser, puis un volcan. La nature nous crache à la gueule et ma matinée sent le souffre ! 

Ensuite, un tour à la source chaude précédée d’une douche à poil commune avec toutes les femmes du coin et je vais faire une ballade en poney, car il n y a que ca à foutre ici, ou bien des randos. On va bien rigoler cet hiver je sens !
Heureusement, ce pays pond des groupes de musique inégalés.
Côté langue, j’ai appris mon premier mot, Eyjafallajökull, donc franchement, c'est pas très dur.
Pour le diner, la mère de Bjørn-Håjon, Sigridur Sigurðadóttir, nous concocte des filets de macareux ! Délicieuses ces espèces en voie de disparition ! Au fait, on m’a dit que les Norvégiens mangent de la baleine, c‘est vraiment dégueulasse.
Le soir, je lis des polars locaux et c'est idéal pour s'endormir les soirs de novembre quand on a peur du noir et qu’il fera re-jour en mars.

Le bécot

Mártine

lundi 22 juillet 2013

Episode 41 : tu te rends compte que tu es restée un peu trop longtemps en Norvège quand...

Chers tous,
Après un printemps insolent en Norvège, alors que la majeure partie du continent ouest européen se plaignait d’une météo pourrie, le soleil continue de briller cet été sur les fjords, les montagnes, les champs, les prairies et la mer.
Madame Norvège est magnifique.


Certes, l’été est idyllique, mais c’est en réalisant que j’étais en maillot de bain dans un parc public car il faisait 20 degrés que je me suis dit qu’il était temps de faire le bilan de ma situation.
Le voici.
Tu te rends compte que tu es restée un peu trop longtemps en Norvège quand :
-          Tu trouves niais les touristes français dans la rue qui s’interpellent à minuit « Mais regarde, Jean-Louis, puisque je te dis qu’il fait encore jour ! C’est complètement incroyable, passe-moi l’appareil photo »
-          Tu as parfaitement oublié, que toi aussi, avant d’y foutre les pieds, tu te foutais complétement de la différence entre Suède et Norvège, et tu te surprends désormais à faire les gros yeux au premier glandu qui confond les deux pays
-          Le prénom Trune te parait parfaitement normal
-          Tu ne trouves jamais rien cher en France
-          Tu te surprends à avoir un a priori négatif sur les Suédois de façon purement gratuite
-          Tu regardes un sketch où des Norvégiens se moquent des Danois et ça te fait exploser de rire « Haha ! C’est tout à fait ça »
-          Tu as quelque peu changé tes codes de politesse : tenir la porte te parait desormais du domaine du franchement optionnel, mais tu te jettes gaiment sut tes collegues quand c'est leur anniversaire pour leur donner un bon hug fraternel
-          Tu rencontres le Vice President worldwide de la boite et, comme il est scandinave, tu attaques direct avec le tutoiement et le prénom (et tu réalises que tout ça va trop loin quand, en retour, ton mec norvégien tutoie les flics en France)
-          Le fait que certains français croient que le sauna c’est norvégien te fait hurler intérieurement – ineptie triviale
-          Tu réagis au quart de de tour devant les yaourts fjørd car fjord sans s'écrit sans o barré enfin, voyons !
-          Tu t’entends faire chier tes potes français à 2h du mat pour leur expliquer que la chanteuse Lykke Li est suédoise et d’ailleurs que Lykke Li c’est un jeu de mot en suédois et que c'est marrant en fait en suédois ça veut dire...
-          Tu dines sans problème à 18h
-          Tu reconnais au goût chaque espèce de saumon
-          Tu culpabilises de ne pas avoir fait un tour au centre fitness depuis deux jours
-          Tout le monde te dit « ah mais toi, tu vis en Norvège, tu dois être habituée au froid ! » alors que te baigner en Bretagne est toujours aussi insurmontable qu’avant
-          Tu ne réagis plus aux gens qui te doublent en ski sur les trottoirs (ski de fond l’hiver, ski à roulettes l’été)
-          Tu mets "nocturne au boulot" et "19h" dans la même phrase
-          Ça te fait bizarre de voir de la pub pour la bière sur les bords des routes de France
-          Tu ne peux plus garder ton calme quand tu reconnais un champion de saut à ski dans le tram
-          Tu reconnais un champion de saut à ski dans le tram
-          Tu orthographies bon du 1er coup Ægil Johannsøn sans qu’on te l'épelle au téléphone
-          En revanche, tu ne sais plus trop si épeler ça prend 1 ou 2 p
-          Tu reconnais tout de suite la fausse neige dans les films
-          Tu admets volontiers d’ailleurs qu’à Oslo, on est pas mal lotis niveau météo. Même l’hiver, après tout, c’est quand même pas Helsinki, on passe parfois la barre des 0
-          Et tu te retrouves en maillot de bain dans un parc public parce qu’il fait 20 degrés

Bref, les vacances en France, ça fait du bien !
Bécots,

Martine 

lundi 24 juin 2013

Episode 40

Chers tous,

Savez-vous quel est le point commun entre Laure Manaudou, Jason Lamy-Chapuis, Rafael Nadal, Petter Northug, Yoann Gourcuff et Usain Bolt ? Ils sont tous nés en 1986.
Et Bjørn-Håkon aussi. C’est ainsi qu’un matin, en se rasant, il s’est dit «  Mais moi aussi, je suis né en 1986 ! Il faut que je fasse un truc de champion un de ces quatre ! Jamais les océans n’oublieront mon prénom non plus ! »,  qu’il s’est dit, en ajoutant « bordel de merde » ! Nan, je rigole, il ne s’est pas littéralement dit ça, il ne parle quand même pas français comme ça. Il s’est plutôt dit « faut pas exagérer, bordel à merde ! »
C’est ainsi qu’avec sa sœur et son père, ils ont décidé de traverser le Groenland à ski.
En France, le genre de réactions classiques à cette histoire de Groenland est du type : « Quoi ?? Le Groenland à ski ? Mais comment ça ? » Alors que si vous dites exactement la même chose a des Norvégiens, ils vous diront «  Ah, c’est énorme, j’ai une cousine qui l’a fait en solitaire en snowkite l’année dernière » (et là, c’est vous qui dites « Quoi ?? En snowkite ? Mais comment ça ? »)
Puisque mon audience est plutôt française, il faut bien le dire, voilà le topo : tu traverses le Groenland à ski avec un traineau qui fait littéralement le poids d’un poney où tu mets ton sac de couchage, ta bouffe et le reste (liste à la Prévert non dénuée d’intérêt, incluant par exemple des batteries solaires pour recharger le téléphone satellite, une carabine pour les ours ou encore un outil qui n’a pas de nom en français pour creuser des trous dans la glace et accrocher la tente au glacier.)

C’est tout aussi magnifique que terrifiant car, ce que ne raconte pas cette photo, c’est que les températures descendent bas, très très bas, genre dans les -40 et qu’ils ont eu beaucoup de mauvais temps. (Pour la petite histoire, Bjørn-Håkon est de retour de son aventure depuis un mois, et ses ongles de pieds tombent un par un, en même temps qu’il a le visage un peu brûlé par le froid. Mais c’est un style !)
Ma contribution à tout ça a été, vous l’imaginez bien, limitée au domaine culinaire. J’adorerais vous faire croire que j’ai piloté la préparation sportive du voyage, mais je pense que le jour où on me voit attendre l’ascenseur pour monter 2 étages, on arrête vite d’avaler mes carabistouilles. J’ai donc fait des trucs à bouffer, je sais même pas comment ça s’appelle :
·         Tu mixes dix sortes de graines et de noix différentes
·         Tu rajoutes de la poudre de coco
·         Tu fais fondre un kg de graisse, un kg de beurre et 3 pots de miels (lovely…et tu ruines une casserole)
·         Tu rajoutes 2kg de farine
·         Tu mélanges tout et tu laisses sécher
Ca fait une sorte de scone géant, un pavé à la pointe de l’optimal en terme de rapport calories / poids à se taper dans le traineau = 4000 calories par kg… en même temps, ils en ont brûlé entre 10 000 et 12 000 par jour, donc c’était de la gnognotte.
J’ai testé : deux bouchées suffisent pour ne plus avoir besoin de faire la grosse commission pendant une semaine. Ils vont pas laisser de traces que j’ai pensé, putain de moyen de faire de l’écotourisme.

Pendant les trois semaines qu’ont duré cette folle aventure, nous regardions à tout instant sur le GPS où ils étaient. Un petit point bleu dans une immensité blanche s’updatait tous les quarts d’heure. « Oh regarde ! Ils font une pause. Oh regarde ! Ils avancent vraiment très lentement. Que dit la météo ? Vitesse du vent 30mètres par seconde, température ressentie -55 degrés C)… on en perdait un peu des cheveux.
Le pire est qu’on ne savait pas la moitié de ce qu’ils faisaient… et que la lecture de leur journal de bord à leur retour m’a, on peut le dire, glacée. « Cette nuit je n’ai pas dormi. Le froid extrême me donnait des spasmes et de la fièvre, et je transpirais alors qu’il faisait -37 dans la tente. » ou encore « Nous sommes coincés depuis 2 jours dans la tempête. La neige qui s’accumule écrase petit à petit sur nous la tente que le vent manque d’arracher à chaque instant. Nous nous décidons finalement à sortir de la tente pour bâtir un mur de glace et nous protéger du vent. Notre téléphone satellite n’a plus de batterie ».)
Eux, à l’inverse, ne savaient pas que la une des journaux norvégiens racontait qu’un Anglais avait été trouvé mort de froid à quelques dizaines de kilomètres d’eux.
Bienheureux les ignorants qu’ils disaient !
Mais ils sont revenus. Amaigris et heureux.
La maman de Bjørn-Håkon, qui ne faisait pas partie de l’équipe, est celle d’entre eux qui a perdu le plus de poids. Elle s’est fait un tout petit peu de souci, je crois. Moi, j’ai simplement vidé les stocks de petits bougies des chapelles et des églises qui tombaient sous ma main en demandant à Marie de me ramener mes trois Norvégiens autrement qu’en surgelés Picard.
(J’arrête là le blabla et vous laisse profiter de cet album magnifique… et authentique J (et merci à Bjø, Kristin et Jørn de me laisser montrer les photos !)
Le bécot à tous,

Martine