lundi 28 novembre 2011

Episode 10

Mardi 29 mars 2011

Chers tous,
Pour ce dixième épisode,  Martine a, pour vous, fait appel au professeur Gluteklutt, Professeur ès Norvégie, auteur du célèbre livre Hvor mange pølser kan du spise i et minut??[1], afin de mener une interview récapitulative sur la culture de base à avoir sur la Norvégie.
Martine: Cher professeur, merci d’être avec nous aujourd’hui.
Prof. Gl. : Ca va, je suis norvégien, on va pas faire dans la forme. Ne tournez pas autour du bac à glace et  passez directement aux questions.
Martine: On va commencer, alors. Pourquoi la Norvège s’appelle-t-elle Norvège, cher Professeur ?
Prof. Gl : Ma pauvre Martine, si vous ne savez pas ça, cet entretien ne va pas casser 3 pates à un phoque, enfin bon. La Norvège veut dire chemin du Nord.  Nor= Nord, Way=chemin, idem en norvégien avec Nor-ge. C’est par là que les premiers hommes sont montés le plus au Nord dans l’histoire de l’humanité. Ils allaient quand même pas passer chez ces gros tocards de Suédois.
Martine: Vous semblez avoir des difficultés avec les Suédois.
Prof. Gl : Je vais être honnête, vos questions sont vraiment moisies. Mais je vais y répondre. Si beaucoup de gens croient que la Norvège et la Suède, c’est flocon blanc et blanc flocon, nous, on a une certaine retenue vis-à-vis du pays de la Volvo, des Krisprolls et autres Dancing Queen à la mords-moi-le-glaçon. On est passé de trois siècles dans le giron danois à un siècle de domination suédoise, à cause de votre FOUTU Napoléon, Martine, on s’est tapé des princes anglais, danois, la totale. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Suède a dit rester neutre quand on était occupés. Et mon cul c’est du renne, Martine ? Maintenant on dit fuck aux Suédois, fuck à tout le monde, y compris à l’UE, que tout le monde nous foute la paix !
Martine: Donc la Norvège n’est pas dans l’UE ?
Prof. Gl.: On va pas se mentir: on a le PIB par habitant de très loin le plus élevé de la planète, c’est pas pour aller financer avec notre pétrole les loosers de l’Europe de Sud ou de l’Est. Notre fond souverain a environ 3000 milliards d’euros et on est 4,9 millions. On est kikil, on distribue pas. En revanche, on est dans Shenghen, on n’est pas non plus des pigeons des neiges.
Martine: Enfin, il fut un temps où les ancêtres des norvégiens avaient une logique moins autocentrée et plutôt conquérante, non?
Prof. Gl.: Ah ! Mais ne nous remerciez pas ! Sans nous, vous n’auriez pas chanté «  J’aime à revoir ma Normandie » mais «  J’aime à revoir ma Svenskerie »
Martine: ??
Prof. Gl.: Men fi pokker (ndlr: en norvégien dans le texte) Martine, vous êtes bêtes à manger des boules de neige. Le passé de la Norvège est connu pour les épopées vikings, d’où le fait que la Normandie s’appelle Normandie. Et oui, en norvégien, Je suis norvégien se dit je suis normand. (nor=Nord, man=homme, un homme de la Norvège quoi, et suédois se dit svensk)
Martine: En parlant de la façon dont dire les choses, comment expliquez-vous la quantité de dialectes si variés dans un pays aussi éduqué ?
Prof. Gl.: Il va falloir tout vous expliquer de A à Å ? Attention, Martine, vous prenez des vessies de Lapons pour des bougies dans la neige ! Dans les années 60, on est devenus extrêmement riches et extrêmement rapidement, à cause du pétrole. On n’allait pas en quelques années changer nos habitudes de vikings de la nature se déplaçant à ski en celles d’un pays centralisé et urbanisé. On est juste devenus très riches, on a gardé nos dialectes et nos deux langues écrites, ainsi que nos 29 lettres : A B C (…) X Y Z Æ Ø Å.
Martine: Ca y est j’ai tout compris de A à Å !
Prof. Gl.: Martine, discerner votre esprit de compréhension, c’est comme retrouver un glaçon dans un igloo, je doute que vous ayez tout compris…
Martine: Oui bon ben ça va. Vous entendez donc que malgré un niveau de vie moyen très élevé, les norvégiens ont gardé des us et coutumes de gens de la campagne, n’est-ce pas ?
Prof. Gl: Martine, faut vous expliquer toute une nuit polaire, mais vous comprenez vite ! Vous avez déjà vu un norvégien souhaiter bon appétit, tenir une porte, s’excuser après vous avoir cassé le bras sans faire gaffe dans le bus ? Non ! On renifle, on n’attend pas que les autres soient servis pour manger au restaurant, on dit pas bonjour, pas au revoir, on n’a pas de mot pour dire s’il-vous-plait, on mange de la pizza congelée le jour de Noël, et on fait n’importe quoi avec l’alcool.
Mais bon, tout le monde nous aime, on a du fric plein les bas de laine de baleine, on est beaux, on s’habille avec des trucs chers et stylés, on est super sympas, on triche pas, on ment pas, on n’est jamais mauvais esprit, on s’énerve jamais, et on a tous des supers beaux voiliers. Convaincue ? høhøhø !

Martine: Très bien cher professeur, merci à vous…


[1] Combien de saucisses peux-tu manger en une minute ?



lundi 21 novembre 2011

Episode 9

Mercredi 16 mars 2011

Chers tous,
Je retire ce que j ai dit.
Vraiment. J’ai ri, je me suis moquée du ski de fond, en long en large et en travers, c’est vrai.
Mais ma vie a basculé il y a deux semaines dans le stade de la coupe du monde de ski.
Franchement, c’était carrément incroyable.
Déjà qu'en temps normal, les Norvégiens ont leur drapeau partout (vêtements, produits alimentaires, arbre de Noël, gâteaux d’anniversaire, nan mais sans blague, vous imaginez ça en France ? Bon anniversaire Marine Lepen !), mais là, c’est sûr, j’en ai eu la preuve vivante, la Norvège est aussi le premier pays du monde en ce qui concerne le ratio : nombre de drapeaux/population. Mon estimation me fait arriver à 81 drapeaux (grande taille, hein) par personne.
Ensuite, c’est assez spécial de se dire qu’on va dans un stade de ski de fond. Mais ça existe. Bon, évidemment, le stade n’est pas complètement fermé, parce que les pauvres machins ils font trente km donc ils deviendraient dingues. En fait, on se trouve au début de la course qui fait une boucle (et donc on est aussi à l’arrivée puisque c’est une boucle, pour ceux qui ont fait une école d’ingénieur). Les mecs se lancent, disparaissent… et ils reviennent. Je me suis demandé si je regardais pas de la formule 1, c’était carrément délirant. Petter Northug (l’archi grande star de cette coupe, un norvégien de 25 ans beau musclé arrogant et stupide, sans surprise quoi) a mis le feu à la neige, je vous jure, y avait des étincelles qui dépassaient de ses skis quand il tournait.
Une fois les champions arrivés, ils se vautrent dans la poudreuse avec deux médecins autour (certaines vomissent même juste après la ligne, nan mais qu’est ce qu’on ferait pas pour se rendre intéressant, je vous jure), les autres suivent, y en a tout un troupeau.
Le dernier arrivé, c’était un tanzanien. Le gars black, tout sourire. Tranquillou pilou les petits virages et le chasse-neige. Il a eu une de ces ovations.
Mais après, on s’est aperçu qu’il y en avait en fait encore un qui arrivait, et lui, il était danois. Ils ont rien dit mais j’ai bien vu que ça faisait vachement plaisir à Bjørn-Håkon et à sa famille que le dernier soit danois. Parce que bon, quitte à pas pouvoir blairer les suédois, y a pas de raison d’être copains avec les danois non plus.
Bref, ovation et hymne national entonné en boucle pour le champion norvégien. Sa tête et celle des quelques autres superstars norvégiennes partout dans les medias pendant dix jours. Ici, si vous ne connaissez pas Petter et consorts, c’est comme si vous aviez jamais entendu parler de Johny en France ou encore vous ne situiez pas du tout le visage de Sarko. Sur-médiatisés, je vous dis. Et des foules plus en délire que pour des stars du rock.
Quand ils terminaient les courses chaque jour, ces fameux sportifs, ils reprenaient le métro au pied des pistes pour redescendre dans le centre ville (ça, c’est le charme d Oslo. Imaginez Tignes au bout de ligne 14 et vous avez tout compris) pour recevoir leurs médailles devant le château du roi.
Les gens étaient déchaînés, il n’y a aurait pas eu plus de monde si Michael Jackson avait fait un duo avec Madonna, U2 et les Beattles (oui je sais, c’est débile, c’est pas possible qu’il chante en duo avec tout ce monde là d’un coup, puisque pour faire un duo, il faut pas être mort). Ovation de quinze minutes donc, hymne national norvégien encore et encore, un truc de dingo.
Bon et puis en plus, ils sont bon esprit ces normands, du coup, ils applaudissent tout le monde. Il y a un français qui a décroché une splendide médaille d’or, Jason, au combiné nordique. Quand l’orchestre du roi de Norvégie a entonné la marseillaise, les norvégiens, ils applaudissaient. De toute façon, pendant les dix jours de cette coupe du monde, les norvégiens étaient complètement euphoriques et tout le temps contents. On pouvait leur dire n’importe quoi, ils se foutaient du reste, la Norvège remportait deux médailles d’or par jour (limite deux par compétition, même si bon, c’est un peu comme l’histoire du duo, techniquement c’est pas trop possible mais c’est l’idée).
Le point d’orgue, ça a été la course des cinquante km le dernier dimanche.
Il y avait 100 000 personnes au bord des pistes, dont 30 000 avaient passé la nuit dans des tentes au bord de la piste, pour être sûrs de voir une demi seconde leurs héros nationaux.
Ils sont fous ces norvégiens. Ils ont des tentes avec des trous en haut pour faire des feux de camps a l’intérieur de la tente, parce que forcément camper dans la nature c est charmant, mais par moins dix, ça l’est moins.
Depuis (si toutefois c’est possible), le ski de fond est encore plus dans le vent qu’avant en Norvège. Bjørn-Håkon, par exemple, fait des compets de ski, des compets, des compets. Il mange tout le temps, il dort beaucoup, et je dois picoler toute seule. Dur de vivre avec un champion.
Au supermarché, je pense que j’ai le même panier que la mère de famille de 40-50 ans avec 4 garçons entre 10 et 18 ans à la maison. Tous les jours, j’achète 3 pizzas XXL, des lasagnes et parfois quand Bjørn-Håkon a encore faim, je fais une tartiflette.
Mais bon, je préfère encore qu’il aime ça plutôt que le biathlon. C’est plus sympa de le voir farter ces skis dans le salon, le soir, en m'expliquant avec force technique « tu vois la neige, demain elle sera tombée depuis approximativement 37 heures, donc il faut utiliser cette couleur de fartage pour optimiser la trajectoire dans les pentes », plutôt que de cirer sa carabine en me demandant « on peut faire un test? Tu vas mettre cette pomme sur ta tête et fermer les yeux »…

Le bécot à tous,
Martine


lundi 14 novembre 2011

Episode 8

Mardi 22 février 2011

Chers tous,
Un petit mot du pays des glaces. Depuis que je suis arrivée, en octobre dernier, je n’ai dû voir Oslo (sans rire) que dix jours sans la neige et la glace, et la neige, et le verglas. (et la neige).
Si je voulais être poète, j’écrirais que j’apprends à conjuguer le verbe neiger à tous les temps, au fil des flocons de ton âme, que quand il neige au fond de mes yeux, des jours sans la glace qui transperce la banquise de mes sentiments, etc, etc.
Mais NON. Ce n’est pas un froid pour la poésie ni la conjugaison. Ce n’est pas léger et joli. Quand on sort le matin, c’est pas « Ohlala, mes biquets mignons, fermez bien votre Kway il fait frisquounet » c’est vraiment « Oh p*** sa mère la ****, il a tellement neigerions cette nuit, qu’encore eut il fallu que je me congelasse pas le potiron, on va tous crever cette fois-ci, sa race. »
L’étape 1 est donc de s’équiper. Le matin, il faut mettre son réveil un quart d’heure plus tôt, pour avoir le temps de mettre toutes les couches possibles et imaginables de vêtements en laine/peau de phoque/d’ours tué au couteau dans une backstreet du quartier mal famé d’Oslo. Sous ses chaussures, il faut clipper des super crampons de 5 cm de long, pour marcher sans se vautrer lourdement comme un Finlandais éméché sur les trottoirs patinoire. (Mais qui font des trous dans la moquette comme si un troupeau de chats sauvages avait fait une rave partie dans le salon.)
L’étape 2 est la première inspiration. Les gars, j’ai enfin compris pourquoi les scandinaves ne s’énervent jamais. Le froid polaire engourdit le visage qui devient en quelques inspirations aussi inexpressif que celui de Cher après ses 16 liftings. Du coup, les narines se figent avec le givre, et on parle au bout de quelques minutes comme quelqu’un ayant passablement abusé de la boisson, à 7h30 du mat’.
L’étape 3 est cruciale : tenter par tous les moyens de ne pas louper le bus. Sinon c’est entre 5 et 10 minutes par -18. Le téléphone sonne? Oui mais est-ce que le coup de fil vaut vraiment le coup de perdre un doigt? (C’est vachement long d’attendre, je vous jure). Parfois, je suis tellement au fond du seau à glace que je pense à vous envoyer à tous un sms du genre : « Je ous aimais, je vais mouri, j’äi déjà perdu 2 doigtrs en ous ecriavnt ça », pour finalement voir le bus arriver.  Merde, too late, je l’ai déjà envoyé à mon meilleur ami, qui une fois m’a répondu, « je reçois le même texto 3 matins par semaine, bordel, Maroni, achète-toi des gants... »
Mais les Norvégiens, eux, ils ont vraiment peur de rien. Vous êtes en béquilles ? Ils en font avec des peaux de phoque dessous pour pas glisser. Vous avez un gamin en bas âge ? Mettez-le dans un petit traineau que vous tractez en ski de fond ! Vous habitez en haut d'une rue en pente ? Rattrapez le bus en ski, en snowboard (véridique) ou en luge dans la rue, voyons !
Et le we, c’est génial puisqu’ils font du ski, du ski, su ski. (Bon de fond bien sûr, ici le ski c’est forcément du ski de fond...). A l’arrivée de la dernière compet’ de ski de fond de Bjørn-Håkon, les mecs qui venaient de se taper cinquante km en ski à -15, il fallait les voir. Ils étaient blancs, avec de la sueur ou de la salive qui avait gelé en stalactites et qui pendait de leur bonnet ou des coins de leur bouche. Les cheveux givrés. Ca foutait les jetons quand même. J'espérais un autographe de Robert Pattinson, j'avais l'impression d'être sur le tournage de Twillight. Mais eux, nan, ils souriaient pour les photos. 
Ca, on peut le dire, les norvégiens ont vraiment la foi. Mais la foi en quoi ? En Norvège il n’y a pas de séparation de l’Eglise et de l’Etat. (D’où le fait d’ailleurs qu’il soit possible de recevoir des invitations du genre : « Viens a la mairie pour fêter ma première communion », ou encore « vous êtes bienvenus à la maison pour une soirée baptême laïque. », paie tes mélanges...)
Le bon roi Harald V est donc le chef de l’Eglise, et le roi d’un petit pays protestant très riche, et en fait purement rationnel et ultra cartésien, avec 100% de baptisés, et peu de croyants finalement.
Ce n’est donc pas en Dieu que les Norvégiens croient, mais bien en LE SKI, LE SKI et LE SKI. C’est une vraie religion, une philosophie de vie. A l’heure où je vous parle, Oslo est en effervescence, la coupe du monde de ski commence demain soir, et justement à Oslo. Tout le monde ne parle que de ca. Rues bloquées, week-end bookés, 90% des produits dans les supermarchés portant le logo de la coupe du monde (y compris les couches, les tubes de mayonnaise, le papier toilette. etc.) Les gens dépensent des centaines d’euros pour assister aux épreuves, ou pour être dans les tribunes du tremplin de saut et voir en live des blaireaux en cellophane risquer leur vie pour au final rester dans l’anonymat.
Toute une histoire. J’ai hâte.
Le bécot à tous,
Martine


mercredi 9 novembre 2011

Episode 7

Vendredi 28 janvier 2011

Chers tous,

L’heure est grave. Au moment où je vous écris, je suis dans une période d’incertitude sur mon avenir dans ce pays.
C’est avec beaucoup d’émotion que je vous préviens qu’il se peut que je sois renvoyée en France comme une vulgaire russe sans papiers. (ndlr: histoire vraie…)
Les événements récents ont un peu précipité mon destin en Norvège, et je pense que mon intégration y est définitivement compromise, pour une cause sur laquelle aucun citoyen norvégien, ni même la préfecture ne fermera les yeux.
Je suis archi et désespérément nulle en ski de fond.
Après un crash test de 4 min 35 secondes puis 2 paquets de kleenex à pleurer dans le froid, j’ai dû me rendre à l’évidence : non seulement je suis nulle, mais en plus, je déteste ça, vraiment. (Même si je dois vous l’admettre, on m’avait prêté des chaussures que Bjørn-Håkon avait quand il a commencé le ski de compétition à 7 ans, et c’était du 41, donc ça n’a pas aidé).
Mon seul espoir pour m’en sortir est de collecter vos dons pour m’acheter un traineau afin de pouvoir continuer à me rendre au travail. Je pourrais ainsi louer un jeune et beau suédois qui, en ski de fond, tirera mon traineau jusqu’à mon travail. (Cheap labour comme on dit ici. Les Norvégiens le pensent sérieusement, en disant que les Suédois sont des fêtards qui parlent fort, débarquent par ferries entiers à Oslo pour faire des petits boulots.... Je crois qu’un grand monsieur avait dit un jour que tout est relatif. Et bien je pense vraiment qu’il n’avait pas tord...)
IL ME FO COLLECTE UN MILLIART DE COURONNE POUR DANS UNE SEMEINE.
CE MESSAGES N E PAS UNE SPAM OU UNE PLESENTERIE. VOUS POUVER SAUVEZ UNE VIE EN FESANT PASSER CET A PELLE A 7 PERSONNE QUE VOUS AIMEZ DAN VOTRE CŒUR.
ALORS VOUS SERE FORTUNER ET IL VOUS ARRIVERA DES GRANDE CHOSE.
SINON UN MALEUR S ABBATTERA SUR VOUS ET DANS L ANNEE PROCHEINE VOUS SEREZ CROQUE DANS LE METRO PAR UN OURSE BLAN.
CHAK FOIS QUE LE MAIL SRA TRANSFERER ALORS LE SUEDOI DU TRENO TOUCHERA UNE PIESSETTE
BIEN A VOUS MES CHER FRERE  JE CONTE SUR TOI SVP


lundi 7 novembre 2011

Episode 6

Vendredi 14 Janvier 2011

Chers tous,

Tout d’abord, permettez-moi de vous souhaiter à tous une très bonne nouvelle année 2011. Ou Godt nytt år comme on dit ici. Enfin, c’est ce que j’ai compris le 3 janvier quand j’ai cru claironner ça à tous mes collègues, puis que je les ai vu tous se poiler parce que je leur avais dit en fait Godt nytt hår (Voyons, ça n’a rien à voir, faites un effort enfin), et que ça voulait dire bons nouveaux cheveux.
Mais il semble que je ne sois pas la seule à avoir des soucis de prononciation. Un de mes potes français a souhaité à ses collègues pendant un an tous les vendredis soir God elg au lieu de god helg, ce qui, au lieu de bon week-end, veut dire bon élan. Un de ses collègues malodorant, qui se trouve en plus avoir un gros nez et des petits yeux marron mesquins ne lui parle plus jamais, va comprendre.
Je me dis qu’en tant que francophones, cette foutue histoire de h aspiré nous poursuivra toujours. (cf le célèbre ARRY POTTEUR, ou encore, pour les copains germanophones, le classique ich heisse devenant ischeisseuh, ou encore le coup du Tortilla paella tapas te quiero Maria vamos a la playa en espagnol. Ah non, crap, ça marche pas en espagnol en fait). Nan parce que franchement, en français, on fait pas trop la différence entre : « hé blaireau, tu la bouges ta caisse ??! » et « éh blaireau, tu la bouges ta caisse ??! ».
Sont ensuite venues les conversations classiques du « t’as passé Noël où ? ».
J’avais envie de les terroriser en leur disant : « Je suis rentrée à Paris et je me suis faite sur-nourrir par ma famille de trucs, vous savez même pas que ça existe. Genre tu prends une oie tu lui ouvres le bec de force et tu lui fais avaler plein de saloperies histoire de lui bouffer le foie en revenant de la veillée de Noël. »
Pour les entendre me répondre, emballés : "C’est chouette ! Nous, depuis l’époque viking, on mange des têtes de mouton coupées en deux au petit déjeuner. Le mieux, c’est quand l’œil du mouton craque sous la dent. »
(Je vous jure que je vous pipeaute pas, voici une photo). Je me sentais pas trop bien après ça et en me disant qu’après tout, nos histoires de foie gras et de fromage bleu, c’était un peu des trucs de mauviette.
Petit dej d'un enfant norvégien de 6 mois
.
Du coup, les norvégiens ont définitivement une version idyllique de la France. Tu pourrais leur dire à peu prés n’importe quoi, ils adhèrent. (mais genre vraiment n’importe quoi, du genre que ta mère te shampouinait au rosé quand t’étais petit, et que se rouler dans les rillettes du Mans, ça donne les fesses roses). Le vin, la bouffe, les belles villes (Paris is so cheap ahaha!, alors ça, Paris, pour eux, c’est les prix de la Pologne pour nous), et surtout SURTOUT la côte d’Azur. Les tartines d’huile Monoï, le soleil, et de l’alcool buvable à moins de 50€ la bouteille, les scandinaves, ils achètent.
Ici, tout ce qui a un nom français est tout d’un coup beaucoup plus glamour. (Il n’y a donc pas que les allemands qui font ça ! ach so lekker, eine BAKETTEUH und ein KROISSANT). Par exemple, notre bière super premium ici, c’est la Kronenbourg, so french et donc so chic. (??). LA marque des sous-vêtements sexys s’appelle Pierre Robert. Imaginez donc une photo des pubs Aubade avec Pierre Robert à la place :
« Leçon numéro 14, Pierre Robert, laissez-le vous dévoiler son gros charme ». Forcément, ça fout le cafard. Comme un ingénieur qui tenterait d'enlever de façon sexy in t-shirt avec un truc dessus du genre Lim(Ln)=∏∑√∫≤≈1 LOL !!!
Autre fait marquant (mais un peu désolant), au sujet du rapport des norvégiens à la France, ils ont été ultra marqués par Hélène et les garçons, exporté jusqu’ici pendant plusieurs années. A l’impro, les copains m’ont chanté en cœur le générique, et quand certains norvégiens sont complétemenpaf, ils me surnomment Cricri d’amour. Merci AB1…
Bon sinon ici, en janvier, il fait encore et toujours un temps pas possible. Du fait de ces conditions climatiques passablement hostiles, on assiste à une multiplication de compétitions de sports plutôt peu communs.
Samedi par exemple, Bjørn-Håkon a participé à la coupe de Norvège d’aviron en salle. Quand j’ai eu fini de rigoler, j’ai bien dû me rendre à l’évidence que c’était possible.
Les mecs sont sur des machines de rameur en rangée dans un gymnase, à 13h30, duquel on voit de la neige et le coucher du soleil à travers le carreau. Au top, ils se mettent à ramer comme des dingues pendant que les copains/coachs/familles leur gueulent dessus en Ikea : DET ER KJEMPEBRA KOM IGJEN STOR DRIT*[1]
Pendant ce temps-là, on voit sur l’écran, qui montre la course virtuelle qui est en train d’avoir lieu, que le numéro 12, Tor Eirik est en train de dépasser le numéro 4, Øystein Knut suivi de près par le numéro 7, Leif Jostein Erlend. Les mecs en chient à max, vous n’avez juste pas idée. Pourtant, il faut bien dire qu’avec la sélection naturelle qu’il y a eu ici pendant un sacré bon paquet de générations, la plupart des participants sont des beaux bébés…
A la fin de la course, les types se laissent tomber des machines comme des vieux sacs, partent au vestiaire à quatre pattes, rampent jusqu’au podium pour les plus chanceux.
Ensuite, vient le relai. Là, ça devient carrément comique. Cette fois-ci, en plus du public, c’est tout le monde qui crie parce qu’ils se HURLENT dessus entre co-équipiers, un truc de débile mental, puis se filent le machin et se dégagent a grands coups de pompes dans les cotes tour à tour de la machine. Le soir, Bjørn-Håkon était lessivé et moi sourde, mais on avait bien rigolé.
En décembre on avait aussi vu le championnat de Norvège de patinage de vitesse. On était 17 dans le public (tous les licenciés + un groupe de quelques français + une veille qui avait besoin d’aller aux toilettes). Les mecs en bavaient aussi, enroulées de cellophane à patiner dans la neige comme des malades. (Mais au moins, on était sûrs que la glace tiendrait bien.)

Le bécot à tous,
Martine

[1] Réponse A. Quel est le prix du tapis bleu descente de lit 30x80 cm?
  Réponse B. Tu vas ramer espèce de sous-merde ??

mardi 1 novembre 2011

Episode 5

Mercredi 22 décembre 2010
Chers tous,
Comme je ne suis toujours pas enneigée dans un fjord, voici un dernier épisode de Martine chez les blonds avant Noël.
Si je faisais le bilan de mes deux premiers mois ici, il y aurait surtout des aspects positifs. Un bon exemple est la capacité qu’ont les norvégiens à ne jamais vraiment se prendre au sérieux….[1]
Par exemple, ils sont capables de vous dire que le couteau à fromage est l’unique contribution de la Norvège à l’avancée des techniques dans le monde, et que la chanteuse d’AQUA, norvégienne, qui chantait Barbie Girl, fait leur fierté, juste histoire de vous faire rire… Alors qu’avec la mentalité d’un cocorico élevé au bon grain français, ils s’attarderaient volontiers sur le fait que leurs arrière-grands-parents trouvaient déjà ultra ringard le Nokia 8210, sur les incroyables œuvres de Krieg et de Munch, et surtout, sur le niveau de leur PIB par habitant (un calcul du genre : 5 436 milliards de trillons d’Euros/4,9 millions de blonds)…
Au travail, la hiérarchie est raplapla : ils font les organigrammes avec le DG tout en bas, (j’ai jamais été si haut dans un organigramme je crois, avec une bonne frayeur au premier coup d’œil : « putain, il y a le DG dans mon équipe ?? »), et me font goûter de la bière en réunion. Et, véridique, les jours de grand froid, le chef de mon chef distribue des saucisses et du vin chaud à l’accueil pour le petit dej. Pas trop de pression sur l’étiquette, donc…
Autre point remarquable, contribuant au calme de la vie ici, ils s’énervent jamais vraiment non plus. Même quand tu leur as dit : "La capitale de la Norvège, c’est Stockholm, c’est ça? », juste pour voir la fumée sortir des trous de nez de Knut[2], un norvégien qui pète un câble le fait calmement. Il sera capable de vous dire avec le ton apathique de la fille des annonces SNCF « le TGV à destination de Brive-la-Gaillarde va entrer en gare voie C. Eloignez-vous de la bordure du quai, s’il-vous-plait. »
« Je suis franchement hors de moi, nom d’un curé de fjord, je vais casser la cabane en bois puis partir en Islande à la nage, éloigne-toi de moi, trou de balle d’ours blanc, s’il-te-plait »
Pas de cris, pas de larmes donc, pas d’étalage d’émotions, ni au travail, ni dans le cercle privé[3]. Le flegme norvégien n’est donc pas une légende. Et ça les fait bien marrer de nous voir à la télé nous déchainer contre les retraites, par exemple. « Nous, on brûle pas nos huskies quand on est pas contents. »
Autre aspect formidable, la beauté de ce pays. Tiens, il y a trois semaines, on est allés à Tromsø, au nord du nord. C’était tout simplement sublime, cette photo est une photo de notre week-end.

 (Photo n.17, premier soir à l’hôtel)
Nan, je rigole, cette seconde photo est vraiment une photo de notre week-end.
 (Photo n.1, arrivée à l’aéroport, en recherche de la direction de l’hôtel par Thor et par Odin, suivez le Nord et l’hôtel se situe à droite juste avant la Russie)

Dans les points négatifs, il en faut quand même, ça va être évident, mais très vrai : le froid.
C’est un peu comme avec les jours qui durent trois heures, si t’es pas né là, c’est pas évident de s’y faire.
Franchement, je me suis toujours dit que les autochtones ici savaient mieux résister, et justement ce week-end, on en a eu une preuve flagrante. La une des infos était focalisée sur le cas d’un petit garçon d’un an qui s’était échappé de son lit à barreaux puis jeté dans la neige par -15, en voilà un jeu rigolo ! Il a été retrouvé une heure plus tard par son père, son corps à une température de 21 degrés. Transféré en hélico à l’hôpital en catastrophe, il a reçu un traitement typiquement norvégien[4], et aux infos, on voyait le gamin aux joues toutes rouges, en forme, en train de tirer la langue aux cameras le lendemain-même comme si de rien n’était. Bref, je pense vraiment qu'ils ont quelques gênes en rab’.
Pourtant, même certains vikings se font avoir apparemment. Par exemple Bjørn-Håkon, qui a trouvé malin d’aller un soir, par -14, faire cinquante kilomètres en ski de fond, avec sur la tête un béret, et il a eu les oreilles gelées, le pauvre vieux. (Acte manqué ??? Il m’a dit pendant dix jours qu’il n’entendait rien de ce que je disais). C’était surréaliste, elles ont enflé, gelé puis brûlé. Elephant man quoi. Et quand, un dimanche matin en pyjama, il m’a emmenée aux urgences de Tromsø, avec ses oreilles gigantesques et rougeaudes empaquetées dans du PQ parce que je m’étais méchamment ouvert le doigt avec un couteau à pain et que ça pissait le sang, j’ai vu dans les yeux du médecin de garde qui me recousait le doigt comme un « oh la vache, votre vie doit pas être de tout repos »
En vous souhaitant de bonnes fêtes de fin d’année J, le bécot à tous,
Martine


[1] …bon sauf évidemment quand on fait des grosses erreurs bien lourdes de culture génerale sur le Nord de l’Europe. Ce que tous les Francais  font tôt ou tard. Comme la fois où un collègue a failli me balancer son assiette de purée d'oignons des neiges à la gueule, car je croyais que la Finlande était dans la Scandinavie. Un norvégien va s'énerver si vous lui dites que la Norvège est dans l'UE, ou encore si vous lui demandez s'il y a plus de montagnes au Danemark qu'en Norvège, ou pire si vous le confondez avec un Suédois, alors là, c'est le pétage de câble assuré..(cf paragraphe pètage de câble à la norvégienne)
[2] Pas besoin de l'énerver pour ça, en même temps, il fait de toute façon -15
[3] Et pas de fight dans les transports en commun avec les petites veilles riches, ni de scandale dans les restaurants quand la cuisse de baleine est mal cuite…dur dur L
[4] Officiellement, on l'a mis dans une couveuse, officieusement on lui a filé trois larmes de coyotes des neiges dans le crâne d'un ennemi sûrement suédois